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RÉSUME DES RECHERCHES IMPCF SUR LA PERDRIX ROUGE AU 27 AVRIL 2016

Ce programme initié en août 2014 par l’IMPCF est cofinancé par 16 FDC adhérentes, par la Fédération  Nationale des Chasseurs et par la Fédération régionale des Chasseurs de la Région PACA.

Les mêmes méthodes ont été appliquées sur deux zones représentatives de l’aire de répartition de l’espèce : Causse du Larzac (Aveyron-Hérault-3000 ha) et zone plus méditerranéenne (Gard-600 ha). Les faibles succès de reproduction constatés depuis plusieurs années par rapport à la fécondité potentielle de l’espèce laissent penser qu’il est peu envisageable de reconstituer les populations même en suspendant la chasse pendant plusieurs années dans certains cas. Par ailleurs, compte tenu des résultats observés à partir des lâchers massifs réalisés par le passé (15 à 20 ans) et actuellement (environ 2 millions de perdrix rouge produites en élevage chaque année), il serait vain de penser développer les populations par les seuls oiseaux issus d’élevage sans tenter d’améliorer leur survie et de vérifier leurs capacités à se reproduire en nature. Si ces deux conditions étaient réunies, les populations de l’espèce seraient plus que florissantes.

L’objectif de ce programme est de chercher des solutions d’avenir pour développer les populations de perdrix rouge soit pour les renforcer en été soit pour les reconstituer si elles sont à un seuil de densité trop faible pour les chasser. En un mot, peut-on expérimentalement améliorer la survie et la reproduction qui sont les deux facteurs clés de la dynamique des populations des espèces et donc de la perdrix rouge ?

À cette date,479perdrix ont été équipées d’un émetteur, ont fait l’objet d’un prélèvement ADN pour les caractériser génétiquement et ont été suivies sur le terrain. Rappelons que les oiseaux lâchés sont issus de souches génétiquement (quasi) pures mais ceci est encore insuffisant car les comportements acquis (conditions d’élevage, éducation, alimentation de transition…) apparaissent comme tout aussi importants.

Le détail précis des oiseaux équipés d’un émetteur d’août 2014 à avril 2016 est le suivant :

  • 211 concernent des lâchers de jeunes en été dont la moitié environ a été éduquée à la peur de l’homme et des prédateurs (lot « éduqué ») et l’autre moitié élevée selon les méthodes habituelles (lot « témoin » : protection pour éviter les pertes, accoutumance à l’homme, alimentation artificielle).
  • 168 concernent des lâchers d’adultes reproducteurs au printemps dont globalement un tiers a été « éduqué » et deux tiers « témoins » (l’éducation de la moitié adultes a été pratiquée en 2016 et pas en 2015).
  • 100concernent des oiseaux capturés en nature dont 39 % de « sauvages » et 61 % issus de lâchers.

RESULTATS (à cette date) : le programme se poursuit notamment en cette période pour évaluer les capacités de participation à la reproduction des oiseaux « sauvages » et de ceux issus des lâchers (reproduction 2016 en cours et postérieure à cette date).

  • RENFORCEMENT DES POPULATIONS EN ÉTÉ PAR LES LÂCHERS DE JEUNES DE 14 A 15 SEMAINES

Ces résultats portent sur 211 oiseaux de 14 à 15 semaines équipés d’émetteur et lâchés en août 2014 et 2015. Au total et respectivement, il a été lâché par les gestionnaires le nombre d’oiseaux bagués suivant incluant les équipés d’émetteurs : sur le Causse : 800 en août 2014 et 700 en août 2015 ; sur la zone méditerranéenne : 500 en août 2014 et 500 en août 2015.

  • En moyenne, calculée sur les deux sites et les deux années (2014 et 2015) la survie des jeunes lâchés en été est comprise entre 20 et 40% un mois après le lâcher avec un avantage pour les oiseaux « éduqués » : si vous souhaitez renforcer les populations en été pour compenser la mauvaise reproduction et épargner les autochtones (PMA par exemple) il est préférable de ne lâcher ces oiseaux en été pas plus tôt que 3 semaines avant l’ouverture de la chasse et d’utiliser des oiseaux « éduqués ».
  • Il est trop onéreux d’espérer installer des couples reproducteurs au printemps suivant à partir de jeunes lâchés en été : 60 à 80 jeunes au moins lâchés pour espérer fixer un couple au printemps suivant.
  • Pour les deux années, la première cause de mortalité apparente de cette catégorie d’oiseaux est la prédation par les carnivores, le taux de prédation par les rapaces est passé de 12 à 22% en 2014 à moins de 10% en 2015. La mortalité par collision est comprise entre 4 et 7%, ce qui n’est pas négligeable car les territoires d’études sont en zone rurale. Le nombre total de cadavres analysés à cette date et pour cette catégorie d’oiseaux est de 175.
  • RECONSTITUTION DES POPULATIONS AU PRINTEMPS

Ces résultats portent sur 168 oiseaux adultes, équipés d’émetteur et lâchés aux printemps 2015 et 2016.

  • La survie des adultes lâchés au printemps est équivalente (10 à 35%) à celle des jeunes en été deux mois après la date du lâcher en zone méditerranéenne.
  • En revanche, sur le Causse, la survie des adultes lâchés au printemps est moindre que celle des jeunes lâchés en été (5% de survie) et ce tant en 2015 qu’en 2016. La première hypothèse est l’inadaptation à la vie sur le Causse (800m d’altitude) de la souche d’adultes élevée depuis des générations dans un élevage situé en zone strictement méditerranéenne. Si cette hypothèse s’avérait confirmée, la première application à la gestion serait de n’utiliser que des oiseaux issus d’élevages locaux de proximité situés dans la même zone climatique. Parmi les catégories et origines des oiseaux suivis en nature, celle-ci est la seule dont on connait l’origine purement méditerranéenne puisque l’éleveur est un producteur (2000 couples environ). La forte mortalité de ces oiseaux observée sur le Causse confirme aussi un fort taux de prédation sur cette zone constatée aussi sur les oiseaux lâchés en été et comparé aux moyennes observées en zone méditerranéenne.
  • En 2016 l’éducation de la moitié des adultes a montré une meilleure survie de ces derniers (31% contre 17% pour les témoins) un mois après le lâcher.
  • Les causes apparentes de mortalité des adultes sont aussi dues essentiellement aux carnivores (50 à 64%). Les rapaces étaient à l’origine de 21% des mortalités en 2015 et seulement à 12% en 2016. Le nombre total de cadavres analysés à cette date et pour cette catégorie d’oiseaux est de 123. Les indices d’abondances nocturnes de mammifères prédateurs susceptibles de porter atteinte à la survie et à la reproduction de la perdrix obtenus par des comptages nocturnes tant en 2015 qu’en 2016 se situent très au-dessus des seuils établis il y a quelques années à partir desquels la régulation par piégeage notamment s’imposait.
  • TAUX DE SURVIE AU PRINTEMPS SUR LE TERRAIN ET PARTICIPATION À LA REPRODUCTION

Ces résultats portent sur 46 perdrix capturées en nature et équipées d’émetteurs au printemps 2015. En 2016, 54 oiseaux ont été capturés en nature ce qui portera l’échantillon total à une centaine quand nous aurons étudié la reproduction de 2016 qui est en cours à cette date. L’échantillon total capturé (N=100) concerne 39% de « sauvages » (non bagués) et 61% d’oiseaux issus des lâchers antérieurs pour les deux années.

  • En 2015, 120 jours après la date de capture et de marquage donc en juillet, la survie des oiseaux sauvages est supérieure (75% environ) à celle des oiseaux issus des lâchers (39% environ). Le « pic » de mortalité est observé en mai lors de la reproduction.
  • La participation des mâles à l’incubation chez certains couples a été vérifiée y compris chez les oiseaux issus d’élevage. Ce comportement naturel pour l’espèce concerne 19% des mâles ayant participé à la reproduction en 2015. Ce chiffre correspond à la valeur moyenne obtenue dans d’autres études notamment en Espagne.
  • Les caractéristiques des pontes (9 à 15 œufs) et le taux d’éclosion (entre 66 et 100%) sont comparables à ceux observés dans d’autres études ainsi que le choix du site de ponte, du moins chez les oiseaux ayant participé à la reproduction.
  • Selon les résultats de 2015, 45% seulement des femelles présentes en mai ont participé à la reproduction.
  • Les taux de reproduction obtenus à partir de circuits d’observations réalisés en été 2015 sont respectivement de 1.77 jeune par adulte sur le Causse et de 0.11 sur la zone méditerranéenne.
  • La densité de couples reproducteurs est passée de 2 à 4 couples aux 100ha sur le Causse entre le printemps 2015 et le printemps 2016 en absence de chasse. En revanche sur la zone méditerranéenne, la densité s’est à peine maintenue voire a diminué en raison d’une reproduction quasi nulle en été 2015 ce qui fait de ce territoire un excellent site d’étude des facteurs limitant la reproduction. Les prélèvements raisonnés sur ce territoire (PMA et faible effort de chasse) ont diminué entre 2014 et 2015 (respectivement 64 et 39 oiseaux contrôlés au tableau).
  • Les résultats de 2015 sur le devenir des pontes montrent un taux de destruction par prédation comparable à celui connu dans la littérature (55%). Ce programme a permis en outre de démontrer sur des « vrais » nids que le sanglier est devenu un destructeur potentiel supplémentaire des nids de perdrix rouge en nature (1 cas confirmé et deux cas avec de fortes suspicions sur 9 nids contrôlés).
  • RESULTATS PROVISOIRES DE GENETIQUE

À cette date, on dispose des résultats de 230 analyses ADN qui nous ont permis de déterminer précisément le sexe des oiseaux et leur taux d’hybridation des différentes origines. Les taux moyens d’hybridation varient selon les lots entre 3 et 5% mais les analyses statistiques ne montrent aucune différence significative entre les lots y compris même pour la catégorie « sauvage » donc non bagués et supposés issus de la reproduction sur le terrain. Au-delà des moyennes, ces premiers résultats ont permis d’identifier certains individus qui étaient hybridés à plus de 10%. Ce premier résultat sera utilement complété par l’échantillon de 172 prélèvements transmis récemment et donc en cours d’analyse au laboratoire ANTAGENE.

PERSPECTIVES ET DEVELOPPEMENT FUTUR DU PROGRAMME

Les suivis se poursuivent actuellement pour quantifier la survie et la participation à la reproduction en 2016 des oiseaux équipés. En août 2016, 90 jeunes de 14 semaines (45 éduqués et 45 témoins) seront équipés et suivis pour terminer ce thème de recherches. Les captures seront renouvelées au printemps 2017 pour compléter les résultats relatifs à la participation et au succès de reproduction. En complément de ces recherches de terrain, l’IMPCF a mis en 2016, après des tests de faisabilité en 2015, 30 couples issus de deux souches (15 couples de chaque) dans des parquets de production et d’observation (10 construits en nature et 20 en élevage expérimental). Cette partie du programme a reçu le soutien financier de la FNC. L’objectif est d’identifier les individus, en outre typés génétiquement, qui ont conservé un comportement de reproduction « naturel » (choix du site de ponte, taille de ponte normale pour l’espèce, couvaison et élevage des jeunes) afin d’en faire les producteurs de demain avec les éleveurs du futur qui souhaiteront évoluer vers des souches aptes à se reproduire et élevées dans des conditions que nous préciserons dans un cahier des charges précis qu’ils devront adopter pour être labellisés.

Ce programme s’inscrivant dans une perspective patrimoniale d’avenir fera sous peu l’objet d’une demande d’aide financière aux Conseils Régionaux PACA et Languedoc Roussillon-Midi Pyrénées dans laquelle nous ajouterons un inventaire génétique des populations actuelles en collaboration avec le laboratoire ANTAGENE afin de réaliser un état des lieux non seulement des taux d’hybridation mais désormais de la diversité génétique, pilier complémentaire du devenir des populations. L’IMPCF, par l’intermédiaire des FDC adhérentes, tiendra régulièrement informées les instances cynégétiques et les gestionnaires des résultats obtenus afin de développer cette espèce qui fait partie de notre patrimoine cynégétique et faunistique. Un rapport d’état d’avancement des recherches de 2014 à 2016 est prévu pour cet automne.

Vergèze le 02 mai 2016.

Direction scientifique et technique IMPCF. (JC-RICCI ; M.NARCE ;F.ALLIER ;H.LASSELIN). http://www.impcf.eu